CONCOURS GÉNÉRAL DES COLLÈGES ROYAUX
Année 1819
De l’origine des notions de substance et de cause, et en général des notions nécessaires
Nous ne pouvons éprouver actuellement une modification quelconque, sentir ou percevoir un phénomène au dedans ou au dehors de nous, sans attribuer le mode senti ou perçu à un sujet permanent, identique, appelé substance, et sans le reporter en même temps à une cause qui le produit, ou le fait commencer.
De là ces axiomes métaphysiques, qu’il ne peut y avoir de qualité sans un sujet d’inhérence, et que rien ne peut arriver sans une cause.
Ces caractères de nécessité et d’universalité de certaines notions, telles que celles de substance et de cause, ont frappé un grand nombre de philosophes, qui les ont distinguées sous le nom d’idées innées, ou sous des dénominations équivalentes, des produits artificiels et arbitraires de l’esprit humain, telles que les idées générales, collectives et abstraites, de classes, de genres, d’espèces.
D’autres philosophes ont nié cette distinction; ils ont soutenu qu’il n’y a dans notre esprit aucune notion qui n’y soit venue par les sens externes, et qui ne puisse se résoudre en sensation ou en pur signe, vide d’idée.
Les élèves seront libres d’adopter, sur cette question, l’opinion qui leur paraîtra conforme à la vérité.
S’ils préfèrent la première, ils détermineront les caractères invariables qui séparent les notions nécessaires et universelles, des idées générales adventices, collectives et artificielles.
Ces caractères déterminés, ils examineront s’il s’ensuit que les notions nécessaires et universelles soient innées à lui-même; ou bien, s’il ne faut pas reconnaître un antécédent psychologique, un fait primitif d’expérience immédiate interne.
Et dans ce cas, en quoi cette sorte d’expérience diffère de celle qui est acquise par le moyen des sens externes; si elle a besoin de se répéter, etc.
Si les élèves préfèrent la seconde opinion, ils feront voir comment la sensation abstraite, généralisée, peut engendrer dans ses développements ce qu’elle ne paraît pas contenir dans sa nature, savoir: quelque chose de nécessaire et d’universel.
Et dans le cas où ils rejetteraient les caractères de nécessité et d’universalité attribués à certaines vérités, ils prouveront, ou bien que le genre humain n’admet pas ces caractères, ou bien qu’une saine philosophie peut se mettre en contradiction avec les croyances du genre humain.
Ils auront de plus à recherche quelle a pu être l’origine de l’idée de nécessité.