Rencontre avec notre confrère Alain-Gérard Slama le 15 juin 2005
La première Rencontre du Concours général s’est tenue le 15 juin 2005, autour de l’intervention de notre confrère Alain-Gérard Slama, professeur à l’Institut d’études politiques de Paris, éditorialiste au Figaro, lauréat du Concours général en version latine (1958), sur le thème du « rôle des médias dans la société ».
Interrogé tout d’abord sur les souvenirs qu’il gardait du Concours général, Alain-Gérard Slama rappelait avec émotion combien cette distinction avait changé sa vie, le conduisant du lycée Carnot de Tunis au lycée Louis-le-Grand puis à l’Ecole normale supérieure de la rue d’Ulm.
Il dressait ensuite dans son intervention un état des lieux préoccupant de la presse en France, avec un vrai problème de pluralisme (2 titres quotidiens par million d’habitants contre 5 en Allemagne et 7 aux Etats-Unis), particulièrement sensible dans un pays où, contrairement aux Etats-Unis par exemple, la presse n’est pas un simple support mais aussi un contenu, qui suppose une connivence entre celui qui envoie et celui qui reçoit ; une baisse des tirages et du nombre des lecteurs (le nombre de lecteurs de quotidiens a diminué de plus de 30 % en 20 ans) ; un problème de crédibilité (50 % des gens ne croient pas que les faits relatés dans les journaux soient exacts) ; enfin un problème de déontologie, avec notamment l’absence de reconnaissance des erreurs qui peuvent être commises. Les journalistes sont favorables à l’existence d’un cadre, mais le problème de la nature de l’autorité chargée de le faire respecter reste entier. En revanche, l’arrivée des bailleurs de fonds dans ce secteur sous-capitalisé mais qui nécessite des investissements importants, n’a pas provoqué les pressions sur le contenu que certains journalistes craignaient, car on ne peut pas transférer le lectorat d’un journal du jour au lendemain.
Pendant le débat, Maurice Druon, qui nous avait fait l’amitié de se joindre à nous pour cette première Rencontre du Concours général, soulignait la question récurrente de la déontologie, du contre-pouvoir du contre-pouvoir. Il ne peut pas être fixé par la loi, car il s’agit toujours de cas d’espèces, de questions d’appréciation, qui ne peuvent être jugées que par des pairs, comme pour les médecins. Mais les journalistes ont toujours refusé un ordre semblable à celui des médecins. Pour sa part, Alain-Gérard Slama pense qu’il faudrait solenniser la carte de journaliste avec une sorte de serment d’Hippocrate.
Lors du débat très riche qui suivit furent abordés le rôle de la radio, de la télévision, d’internet, de la presse gratuite, des agence de presse (dont les dépêches ne sont pas assez exploitées pour Alain-Gérard Slama, les journalistes reprenant les mêmes informations, sous la pression de la demande du public et aussi du manque de place dans les journaux), la qualité de la langue utilisée dans les journaux (Maurice Druon indiquant que les journalistes parlaient en général un français correct, le problème venant plutôt des animateurs), et la nécessité de recruter et de former des journalistes.